Nous connaissons tous les avantages de la vitesse. Performance, réactivité, rebond, sont autant de bénéfices incontestables, associés à cette notion.

C’est pourquoi elle a été si valorisée en entreprise ces dernières décennies, permettant de nombreuses avancées, possibles notamment grâce à un formidable phénomène d’accélération (des délais de transmission de l’information et de son traitement, bien sûr, mais aussi des prises de décision, des transports, etc). Et ce mouvement d’accélération continue pouvait sembler exponentiel. Comme si tout allait toujours aller de plus en plus vite. Ce qui correspond à un paradoxe vertigineux car autant le processus semble infini, autant notre vécu est de plus en plus marqué par un sentiment d’éphémère et de vulnérabilité…

Serions-nous victimes de notre vitesse ?

Mais en cette année 2023 nous sommes peut-être en train de toucher les limites de cette accélération perpétuelle, à la fois individuellement et collectivement. C’est le cas dans les entreprises, où les managers constatent toujours davantage que les cerveaux comme les corps ont des limites, qui – elles – ne peuvent pas être repoussées indéfiniment (Cf. le phénomène de plus en plus fréquent et massif du burn-out). Et aussi, bien sûr, lorsque l’on considère l’état de notre planète et l’ampleur des crises écologiques qui s’accumulent. Notre goût pour la vitesse, son ivresse, nous conduisent très vite dans une direction dont nous pouvons non seulement nous demander si elle est la bonne, mais aussi si c’est bien celle que nous avons choisie collectivement.

C’est que la vitesse produit aussi un certain nombre d’inconvénients : elle érode la capacité d’attention et limite le nombre de variables retenues dans la prise de décision, mais surtout, elle peut brider la capacité créative. Car lorsque l’on discerne moins d’informations sur son environnement, tout en ayant le sentiment qu’il y en a de plus en plus, on peut avoir tendance à se focaliser sur certaines d’entre elles, ce qui produit l’effet de downloading bien décrit dans la Théorie U : je ne retiens finalement que ce que je sais/connais/crois déjà. Ce biais de renforcement et de répétition conduit à son tour à faire ce que les systémiciens appellent « plus de la même chose ». En effet, répéter des comportements, répliquer des pratiques, est beaucoup plus économique en énergie que d’en inventer de nouveaux. Donc, assez tentant ! Mais cela éloigne parfois d’une solution durable aux problèmes complexes. Or, notre monde – confronté à des crises multiples d’une ampleur inégalée jusqu’ici – ne peut pas se contenter de répétitions pour résoudre ces problèmes inédits. Leur résolution requiert un changement de niveau de réflexion, et de conscience. Et celui-ci pourrait bien passer par la voie du ralentissement…

Ralentir : une solution ?

J’entends déjà les adeptes de la vitesse se récrier : « Quoi ! Ralentir !?! Quelle horreur ! Quel échec ! Et surtout quelle marque de faiblesse !  Les forts accélèrent toujours. »

Alors, précisons : y compris pour ceux qui aiment, savent et ambitionnent de continuer à aller vite et à accélérer, il ne s’agit pas ici d’un plaidoyer pour le droit à la paresse mais d’une invitation à considérer le bénéfice de l’alternance de rythmes et de valoriser les bulles de ralentissement. Des moments de pause, destinés à alimenter l’analyse des situations de façon différente, à stimuler la réflexion en explorant d’autres zones du cerveau, moins basées sur la réactivité que sur la position méta et la réflexivité. Et renforçant donc l’alignement entre le socle fondamental de chaque personnalité (ses valeurs et aspirations) et ses conduites.

C’est pourquoi je déploie actuellement des Cercles de ralentissement, destinés aux dirigeants et managers.

Les Cercles de ralentissement

Le principe est simple : proposer aux participants un espace contenant, réunissant régulièrement des pairs, et dans lequel tout échange, toute réflexion, tout dialogue, et toute recherche d’option d’action quant aux problématiques professionnelles traitées est précédé et comme fertilisé par un temps de centrage silencieux. Il s’agit de faire du vide dans les têtes pour que du neuf puisse y trouver assez d’espace pour poindre. Ainsi le mode réactif peut-il cesser d’être le mode exclusif de l’action dans les organisations et son recul permettre l’émergence du mode génératif, voire régénératif.

Basée sur les principes des recherches les plus récentes en neurosciences, cette approche produit des effets très puissants pour les dirigeants : elle renforce la hauteur de vue, nourrit le discernement et stimule la créativité et la pensée écosystémique, tout en permettant de renforcer le sentiment de sens par un profond réalignement personnel.

Est-ce utile pour vous ?

Pour savoir si ce dispositif pourrait vous apporter quelque chose, je vous propose de répondre pour vous-même aux questions suivantes :

  • Ai-je l’impression d’un bon ratio énergie engagée/résultats obtenus pour ce qui concerne mon travail et celui de mes équipes ?
  • Combien de fois ai-je eu l’impression d’avoir terminé/bouclé un dossier de façon très satisfaisante ces 12 derniers mois ?
  • Dans quelle mesure ai-je le sentiment que mon travail m’épanouit ?
  • Est-ce que je me sens vraiment utile dans mon travail ?
  • Est-ce que je contribue activement au quotidien à ce qui me tient le plus à cœur ?
  • Est-ce que les relations que j’ai au travail me semblent positives et stimulantes ?

Bonne réflexion et à bientôt, peut-être, pour poursuivre l’échange sur ces sujets cruciaux…

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