Nous voici dans les tous derniers jours de l’année 2022. Alors, 2050, c’est bien loin ! Et en même temps, c’est demain.

2050, c’est en tous cas l’horizon que nous nous sommes donné pour ramener nos émissions de CO2 à … zéro. C’est un énorme défi qui va impacter massivement les organisations. Alors, comment les dirigeants peuvent-ils se préparer dès aujourd’hui à amorcer, puis déployer, les immenses changements qui figurent au menu des trente années prochaines ? En quoi doivent-ils changer, eux-mêmes ?

Ils peuvent être tentés de considérer que le challenge est avant tout technique et scientifique, et se plonger dans des questions telles : comment allons-nous faire pour trouver des systèmes de propulsion propre pour nos avions ? Comment pourrons-nous stocker de l’électricité produite à partir de sources renouvelables et alternatives ? Par quoi remplacerons-nous le pétrole quand il n’y en aura plus ? Ils peuvent aussi estimer que l’enjeu est avant tout financier et chercher à faire converger les flux vers l’investissement utile à la transition écologique, pour mettre un terme aux investissements toxiques, souvent plus rentables…

Pourtant, il me semble que la véritable gageure pour les équipes dirigeantes des entreprises, n’est pas d’ordre technico-économique mais d’un ordre finalement plus intime : il s’agit d’opérer un profond changement d’attitude vis à vis du monde. Car le nouveau régime climatique (selon l’expression proposée par le sociologue et philosophe Bruno Latour) nous invite à une transformation radicale de nos sociétés. Tout va être bousculé : nos modes de production, de consommation, de déplacement, d’alimentation, … Autrement dit : l’intégralité de nos modes de vie. Et évidemment, les organisations ne pourront pas rester en retrait de ce mouvement. Mais leur bascule ne pourra se faire que si nous sommes prêts ; plus que prêts : « consentants » ; et même plus que consentants : « désireux/désirants » de nous lancer dans cette transformation. Le rôle des leaders, dans les entreprises, comme en politique, voire dans la société civile, est donc de s’engager de façon volontariste dans cette transformation pour en accélérer la diffusion. Et le temps presse !

Pour cela, chaque dirigeant.e est appelé.e à s’interroger sur les moyens de renforcer les capacités et compétences qu’il.elle va devoir mobiliser au service de ce chantier titanesque, tant dedans que dehors. Voici quelques pistes, à trois niveaux décisifs…

1 : Le niveau individuel

Le plus urgent : renforcer l’agilité cognitive

« Le principal ennemi de la vérité, ce n’est pas le mensonge, c’est la croyance. » (Friedrich Nietzsche)

Le premier changement qu’il faut amorcer sans délai est celui de la transformation ultra-rapide de nos représentations du monde. Pour les leaders, il s’agit ni plus ni moins de prendre acte du fait que le monde n’est pas (plus ?) tel que nous le croyions, et d’agir en conséquence. Illustrations :

  • La Terre est une petite planète et les ressources naturelles sont rares, limitées,
  • La « Nature » n’est pas autour de nous, c’est nous qui sommes dedans,
  • Nous ne sommes ni minuscules, ni géants ; mais nous sommes interdépendants de toutes les formes de vie sur Terre.

Le plus audacieux : doper la capacité créative et alternative

Chaque leader devra aussi chercher les moyens de renforcer sa capacité de contestation du statu quo et de créativité. En effet, les leaders sont nécessairement des innovateurs, au sens premier du terme. Ils ne peuvent pas se laisser immobiliser par la croyance que « ça ne peut pas être autrement puisque cela fonctionne comme cela ». D’autant plus qu’ils ont appris à la débusquer dans les propos de leurs équipes, et à la considérer comme une marque de résistance au changement organisationnel. Il n’y a pas de raison que cela ne s’applique pas à une autre échelle : oui, un autre type de société est possible, dans lequel les entreprises fonctionneront différemment, selon un modèle économique et de gouvernance nouveau, qui reste à inventer.

Le plus profond : étayer la compétence émotionnelle et éthique

Pour jouer un rôle actif dans cette grande transformation, les leaders devront renforcer leur capacité à gérer l’impact émotionnel énorme que provoque sur tout un chacun la conscience de contribuer activement, par nos actions les plus anodines, à la destruction du monde. En effet, ce n’est pas ce que nous voulons ; mais c’est bien l’effet collectif que nous produisons.

Pour éviter la dépression et le gouffre de la culpabilité, il s’agira de favoriser des approches dynamiques pour soi-même et pour les collectifs :

  • En renforçant son alignement personnel : en quoi ce que je fais contribue effectivement à ce que je souhaite pour le monde ?
  • En suspendant le mode réactif (qui fait décider vite selon des critères externes et restreints) et en cultivant le mode centré (qui permet de décider calmement à partir d’une instance bien posée en soi, et connectée au monde, dans une approche holistique).

2 : Entre pairs, dans les CODIR et COMEX

Le plus fondamental : cultiver la position méta

A l’avenir, les leaders devront aussi coopérer davantage, ce qui suppose notamment de :

  • Développer sa capacité à identifier les mécanismes psychologiques à l’œuvre dans les groupes, notamment les mécanismes de fermeture et d’ouverture (tels qu’ils sont décrits dans la théorie U, formulée par Otto Scharmer),
  • Savoir identifier les dérives liées aux jeux psychologiques au sein des groupes et proposer des actions qui y mettent un terme,
  • Maîtriser les protocoles qui permettent d’orienter l’énergie vers des interactions constructives et innovantes au sein des équipes, pour passer de la rivalité à la complémentarité et la saine émulation.

Le plus radical : oser la divergence

Les leaders de demain devront être plus à l’aise dans la création de nouveaux systèmes que dans la préservation et l’optimisation des systèmes existants. Pour cela, ils auront besoin de renforcer leur capacité à challenger leurs propres habitudes de pensée et d’action. Cela passe par le développement de certaines postures, entre pairs :

  • Accepter la position minoritaire, dans un système où la majorité est conservatrice,
  • S’ouvrir à la divergence d’autrui, et ne rien écarter d’emblée,
  • Intégrer volontairement dans les instances de délibération des acteurs nouveaux et des voix discordantes,
  • Oser proposer d’autres voies, s’éloigner des modèles de pensée existants…

Tout ceci suppose de défier le conformisme naturel des groupes : pour cela, il importe d’être toujours plus aligné, inspiré et assertif…

Le plus structurant : pratiquer la responsabilité élargie

Les leaders devront de plus en plus prendre des décisions à l’aune d’une responsabilité hyper-élargie :

  • Élargie « horizontalement » :
    • Décider en intégrant l’intérêt de l’ensemble des parties prenantes et l’intérêt général et non plus certains intérêts particuliers uniquement.
  • Élargie « verticalement » :
    • Décider en prenant en compte l’intérêt d’acteurs qui ne sont pas encore nés : les individus à venir de toutes les espèces. (Cela reviendrait-il à faire du futur une partie prenante, en tant que telle ?)

3 : Avec les équipes, en tant que manager

Sur ce point, rien de nouveau sous le soleil : il s’agira toujours de continuer à mettre en œuvre les capacités d’exemplarité, de vision et d’incarnation sans lesquelles il n’y a pas de leadership durable.

Les leviers au service de ces changements

Pour continuer à développer ces qualités, dispositions et compétences clés, les leaders peuvent s’appuyer sur trois leviers majeurs :

  1. Le coaching individuel, qui permet de mener une réflexion personnelle approfondie sur son alignement,
  2. Les cercles de dirigeants, qui soutiennent et renforcent la capacité à innover en conscience dans ce type de fonction,
  3. Le coaching d’équipe, qui aide les collectifs à se donner un cap commun et à faire émerger une intention vraiment partagée.

Il s’agit d’approches éprouvées, que notre cabinet déploie depuis près de 20 ans. Elles ont démontré leur puissance inspiratrice dans toutes les sortes de changement que les leaders ont eu à vivre et à impulser ces dernières décennies. Nul doute qu’elles constitueront de précieuses ressources sur ces sujets vitaux et téléologiques d’aujourd’hui et de demain…

Alors, parlons-en, pour les mettre en œuvre, chez vous !